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Intervention dAnne Hidalgo - Président de la commission Les socialistes et le marché
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Intervention dAnne Hidalgo - Président de la commission Les socialistes et le marché
Anne Hidalgo, présidente de la commission de la rénovation sur Les socialistes et le marche présentait un point détape du travail de sa commission à loccasion du conseil national du 27 octobre à la Maison de la mutualité.
Chers camarades,
Merci, jai lhonneur de présider la commission qui sappelle « les socialistes et le marché : quel modèle de croissance, de redistribution juste et durable aujourdhui, une stratégie nationale et européenne pour un socialisme moderne », voilà lintitulé de notre commission et je remercie Harlem Désir et Guillaume Bachelay qui en sont les rapporteurs. Je remercie aussi tous les membres de cette commission.
Notre forum se situera le 15 décembre, donc nous avons un petit décalage par rapport au travail qua présenté Jean-Jacques et bien sûr, aujourdhui, je suis en mesure de présenter létat de notre questionnement, plus que létat dun texte qui serait validé par lensemble des membres de cette commission.Peut-être quelques mots en introduction avant de vous dire quelles sont les grandes problématiques et puis la méthode sur laquelle nous avançons.
Je pense que je ne choquerai personne, en tout cas, jen suis convaincue, en disant quil y a longtemps que nous, socialistes, avons pris en compte lexistence du marché comme une réalité, et que cette réalité, nous essayons de la modifier, de la bouleverser à travers des politiques publiques, lorsque nous sommes en situation de gouverner, ou à travers des propositions lorsque nous sommes dans lopposition.
Je pense aussi que je ne choquerai personne en rappelant que léchec de toutes les tentatives de substituer au marché une économie totalement administrée, quelle quen soit la forme, ne fait que nous confirmer dans cette idée et dans ce choix. Et dailleurs, si certains, lorsquon évoque ce thème, nous renvoient à lidée que, effectivement, les socialistes ne seraient pas clairs dans leur rapport au marché, ne soyons pas dupes. Ceux qui nous mettent en demeure daccepter le marché, ce qui nest pas notre débat, ont un autre objectif : cest sans doute nous faire accepter avec résignation des logiques économiques qui dominent aujourdhui le monde.Nous sommes aujourdhui dans une situation où le capitalisme circule partout à la recherche de rentabilité et du profit maximal à court terme, et met en concurrence, ce capitalisme financier, jy reviendrai tout à lheure, met en concurrence à léchelle mondiale, non seulement les systèmes fiscaux et sociaux mais aussi met en concurrence ou plutôt tente de mettre en échec les systèmes démocratiques. Puisque sa logique, sa volonté, à ce capitalisme financiarisé auquel nous sommes aujourdhui confrontés, cest de considérer que les démocraties nont pas de rôle et pas despace, que lessentiel doit se passer au niveau de ce marché mondialisé de la finance.
Nous ne sommes donc pas aujourdhui en présence dun marché en général, ni même dun capitalisme en général, mais bien dun capitalisme dominé par les marchés financiers dans un espace mondialisé et cette financiarisation qui déshumanise, qui cherche aussi à dépolitiser et ce sur quoi nous devons nous interroger, et nous interroger sur les politiques publiques à mettre en uvre, bien sûr à léchelle nationale, cest un des espaces de notre réflexion, mais aussi bien évidemment à léchelle européenne et à léchelle mondiale.Donc en gros, entre soumission béate et négation du marché, il y a place pour ce qui est notre combat politique, à nous socialistes français et socialistes européens, à se voir réguler, maîtriser, civiliser le marché par la mise en uvre de politiques de gauche, progressistes ; des politiques de justice sociale, mais des politiques qui rétablissent le fait démocratique comme le fait qui doit être le fait dominant dans nos sociétés en rapport au fait dominant des marchés financiers que certains essaient dopposer. Donc ceci est le combat moderne dans lequel nous devons nous situer.
Alors ce forum, il a bien sûr plusieurs enjeux : des enjeux lourds dabord caractérisés clairement de capitalisme contemporain, je lai dit, fondamentalement financiers dans une économie de marché mondialisée. Ce forum a aussi pour fonction de réfléchir aux régulations nécessaires à mettre en place au niveau microéconomique, niveau de lentreprise, niveau national, niveau européen et bien sûr, niveau mondial. Nous devons nous interroger et parler, dire, affirmer un certain nombre de principes quant au rôle des Etats, cela bien sûr nous amènera aussi à nous interroger et à faire des propositions sur le système productif et sur la participation de nos politiques à la réduction des inégalités au lieu de ce à quoi nous assistons aujourdhui.Nous devrons aussi mener une réflexion claire sur la question des services publics et sur le rapport entre secteur public et secteur privé. Dans ce domaine, il faut nettement poser des bases, ce que nous essaierons de faire, de ce qui doit être un modèle de développement socialiste, intégrant lefficacité économique, mais aussi la responsabilité écologique, et bien sûr le développement social.
Dailleurs, sur cette question, secteur public, secteur privé, on le verra, est-ce quil faut définir des frontières étanches ? Est-ce quil ny a pas sur plusieurs types de biens des espaces de secteur privé et des espaces de secteur plus protégé ? Ce sont des questions qui sont évoquées aujourdhui par un certain nombre de contributeurs dans notre commission.
Nous devrons bien sûr aussi intégrer la problématique de la répartition des rôles et notamment ce qui concerne les différents acteurs : les collectivités locales, lEtat, les partenaires sociaux.
Parallèlement à ces enjeux sur lesquels nous devons travailler, nous avons, nous, au sein de la commission, défini une méthode assez voisine dailleurs de celle que Jean-Jacques a évoquée tout à lheure, méthode qui a été dabord de procéder à des auditions, des auditions déconomistes mais nous espérons aussi pouvoir auditionner des partenaires sociaux et puis un temps de travail de cette commission sur un texte et nous voudrions que ce texte, qui serait le rendu de notre travail collectif, soit disponible aux alentours du 20 novembre pour quil nous laisse encore le temps darriver jusquau 15 décembre, lors de lorganisation de notre forum.Nous avons besoin aussi, et là, je fais appel aux Premiers fédéraux, nous avons aussi besoin des contributions des fédérations sur ce sujet, et bien sûr, nous sommes disponibles, les membres de la commission, pour soit animer - malgré les difficultés évoquées tout à lheure - soit en tous les cas, accueillir et recevoir un certain nombre de contributions sur ce sujet.
Nous nous sommes, dans cette méthode, entendus. Le mot « entendus » ne vaut pas une validation ferme et définitive, mais quand même, sur des éléments dun diagnostic. Nous nous sommes dit : partons de ce qui a changé depuis dix ou quinze ans. Dailleurs les derniers travaux du Parti socialiste, les dernières expressions du Parti sur ces questions-là datent dil y a une bonne dizaine dannées (les conventions sur lentreprise, conventions sur la mondialisation), donc nous nous sommes dit : que sest-il passé ? Quelles sont les évolutions marquantes de ces dix, quinze dernières années qui nous amènent à nous requestionner sur le sujet ?Dabord, le monde a changé, cest une évidence. Lorganisation planétaire de la production, la répartition des richesses, tout cela a profondément évolué. La financiarisation du capitalisme, je lai dit tout à lheure, mais aussi lémergence des émergents, je pense bien évidemment à la Chine et à lInde, qui ont explosé dans leur modèle de développement, sans pour autant à lintérieur de ces états, avoir profité dune croissance économique absolument record pour diminuer les inégalités sociales dans ces pays. Donc cela, cest un élément que nous devons absolument prendre en considération dans notre réflexion.
Autre élément également de profonde évolution du monde, cest quà côté de ces émergents qui émergent et qui réussissent au moins sur le plan économique parce que bien évidemment, sur le plan social et démocratique, les choses en vont autrement, il y a aussi des Etats, des continents qui senlisent. On pense bien évidemment à lAfrique qui ne profite pas non plus de cette croissance mondiale et de cette émergence.Alors par rapport à ces situations et ces bouleversements du monde, nous aurons bien sûr à nous interroger sur le rôle des institutions internationales, à formuler des propositions mais aussi, et surtout, à nous interroger sur nos stratégies par rapport aux émergents, je pense à la Chine et à lInde. Lidée, par exemple, que lEurope puisse être aussi un espace non seulement de coopération, mais aussi de protection par rapport à ce qui se passe provenant de ces pays, est une question que nous avons évoquée, et aussi, nous aurons à nous interroger : sur quelle aide au développement des autres, de ceux qui ne sont pas dans lémergence ?
LEurope aussi a changé, cest un deuxième élément de notre constat, il faut mieux partir de formulations simples sur lesquelles on sentend, elle sest élargie cette Europe, elle est passée de douze à vingt-sept, posant bien évidemment des problèmes de fonctionnement, mais de convergence, de solidarité, dintérêts communs, de moins en moins identifiés et dintérêts de chacun de plus en plus présents. Il y a eu la réunification allemande, il y a eu la réduction aussi des écarts de développement dun certain nombre de pays de lEurope du sud, je pense bien sûr à la situation de lEspagne, du Portugal ou de lIrlande ; le passage à leuro et lexistence désormais de leuro, qui à la fois sur le plan de nos rapports à lextérieur de lEurope peut pour certains poser problème, si lon considère le niveau de leuro par rapport notamment au dollar, mais on peut aussi considérer que le passage à leuro et le fait davoir une monnaie comme leuro aujourdhui constitue aussi un rempart à lévidence qui nous a protégés de la crise financière internationale.Et puis il y a cette panne, cette panne politique et sociale de la construction européenne qui est aussi un des éléments forts, marquants de ces dix, quinze dernières années et donc là aussi, question à se poser : nous avons reçu, notamment Stephan Collignon, qui est un économiste, camarade au SPD et qui travaille à Londres, à la London School of Economy je crois, qui a émis un certain nombre didées partant de lanalyse économique de la situation de lEurope pour arriver à des propositions qui relèvent de la construction dune Europe politique, passage obligé si nous voulons que lEurope soit effectivement un élément fort pour nos Etats et pour le modèle auquel nous sommes attachés dans cette compétition internationale.
Troisième élément très fort de ces changements intervenus ces dix, quinze dernières années, à lévidence, le choc écologique. Aujourdhui, on ne peut plus considérer quune politique de développement économique, de développement social ne doit pas en même temps prendre en cause la question écologique et la question de la planète que nous léguons aux générations futures.
A lévidence, la fin des énergies fossiles, à lévidence laccroissement de la population mondiale posent des questions sur le type de modèle de développement que nous voulons assumer et promouvoir.
Nous socialistes, nous considérons bien évidemment que la décroissance ne peut pas être une alternative. Ce nest pas cela, la piste, la voie vers laquelle nous devons aller. Cest un modèle de développement durable, fondé sur une croissance parce que sans croissance, il ny a pas de production de richesses et donc il ny a pas de possibilités de financer des systèmes sociaux qui permettent justement de prémunir, de rattraper ceux qui se trouvent être les laissés pour compte de la mondialisation.
Donc nous devons absolument intégrer cette donne dans les propositions de politique économique que nous aurons à faire, cest un élément aujourdhui clé.Face à ces changements sur lesquels nous nous sommes entendus pour les constater et quon devra analyser de façon un peu plus profonde, il y a des défis qui sont posés à la France et une des premières questions que lon peut se poser, cest : pourquoi dans ces mutations extrêmement fortes, dautres pays y compris en Europe, sen sortent beaucoup mieux que nous ?
On pourrait être amené, comme certains le pensent, à considérer que tout cela ne relève pas de la responsabilité des politiques et des politiques nationales, mais si lon regarde ce qui sest passé entre 1997 et 2002, une situation où la croissance mondiale, la croissance en Europe était forte, la France, sans doute grâce à des politiques économiques, des politiques de redistribution sociale à cette époque-là, a réussi à capter et à profiter de cette croissance internationale et na pas été dans les laissés pour compte.
Aujourdhui et depuis 2002, la situation est tout autre. Il y a une situation économique mondiale de croissance qui profite à beaucoup et dans laquelle la France narrive pas à sen sortir.
Bien sûr, la droite a des réponses très simples. Les réponses simples de la droite, cest : la rigidité du marché du travail. Bien évidemment, cette réponse ne peut pas nous satisfaire. Elle ne peut pas nous satisfaire, nous socialistes, parce que quest-ce qui est rigide sur le marché du travail ? Est-ce que cest le droit social, le droit du travail qui serait trop protecteur ? Ou est-ce que cest par exemple la faiblesse du taux demploi des plus de 50 ans qui ne constituerait pas la faiblesse majeure de notre marché du travail ? Nest-ce pas la faiblesse du niveau de qualification de la main-duvre française, je ne parle pas des jeunes qui sortent de plus en plus qualifiés mais parle des actifs, des gens qui ont aujourdhui entre 30 et 50 ans, qui sont engagés dans la vie professionnelle, et qui, pour en gros 35 % de cette classe dâge, nont pas pu accéder au niveau bac ?Est-ce que ce nest pas cela, une des faiblesses de notre marché du travail, plutôt que de pointer les rigidités comme le fait la droite ? La protection sociale, est-ce un haut niveau de protection sociale qui constitue un frein à la compétitivité française ? Là encore, bien évidemment, cela ne peut pas être notre réponse.
Nous sommes conscients, et je crois que là aussi, nous pouvons nous retrouver là-dessus, quil y a un besoin à réformer notre système de protection sociale et notamment à le financer en trouvant des ressources financières qui ne peuvent pas être uniquement fondées sur la taxation du travail, cela, je crois que nous le partageons, mais pour autant, il suffit daller voir le film de Michael Moore qui nest pas caricatural, contrairement à ce que certains disent, pour voir que lattractivité, je vais conclure, lattractivité de notre pays, cest aussi son système de protection sociale.
Politique fiscale au service de la redistribution, le rôle de lEtat et la pérennité des services publics, autant de sujets qui, sur les leviers que la France doit pouvoir trouver pour être engagée dans cette compétition internationale et que nous, socialistes, devons nous réapproprier avec une formulation de propositions fortes, voilà les sujets que nous aurons à évoquer.
Je marrête là, nous aurons à lévidence beaucoup de convergences de fond. Nous aurons sans doute aussi quelques divergences de fond, mais je pense quil y aura beaucoup de débats sémantiques. Alors mes camarades, à un moment donné, entre la sémantique et la politique, il faudra choisir.Je vous remercie.
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