• La leçon de Denver par Thierry Mandon

    Thierry Mandon

     

    La leçon de Denver<?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p></o:p>

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    Un enthousiasme sans précédent depuis les années Kennedy. Un parti uni autour du premier candidat noir jamais investi pour une élection présidentielle américaine. Les Américains, eux, savent désigner un candidat à l’élection présidentielle et le mettre en condition de gagner.<o:p></o:p>

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    Leur système de sélection par des élections dites « primaires » a presque un siècle. Quoique prenant des formes particulières selon les états, il repose sur un seul et même principe : la désignation par une partie très large de l’électorat (en l’occurence démocrate) de celui qui sera leur candidat pour l’élection présidentielle. Très large n’est pas un vain mot puisque cette année, par exemple, près de 37 millions d’électeurs démocrates ont arbitré le duel entre Hillary Clinton et Barack Obama, soit près de 60 % des électeurs démocrates de la dernière élection présidentielle (en 2004, John Kerry avait réuni 59 millions de voix). S’étalant sur les six premiers mois de l’année d’élection et donnant lieu à d’intenses luttes entre concurrents, l’élection est organisée par les partis qui en sont le garant et éventuellement l’arbitre afin que soient respectées les règles retenues pour la désignation. Participation massive à la désignation, dirigeant du parti jouant le rôle d’arbitre : l’inverse du système auquel s’accroche les socialistes français.<o:p></o:p>

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    Ici, deux cents militants du parti au plus (soit 1 % environ des électeurs socialistes) doivent désigner le présidentiable. Conquérir les suffrages d’un corps électoral aussi restreint exige des postulants une mobilisation et une organisation de tous les instants. Résultat : des écuries présidentiables conçues comme des forteresses plus soucieuses de se distinguer les uns les autres que de bâtir un projet commun ; des jeux d’alliances et de contre-alliances incessants entre écuries afin d’écarter tel ou tel rival ; l’essentiel de l’énergie du parti mobilisée par les luttes internes. Quant à l’arbitre, il n’y en a pas. Celui qui fait la règle, la direction du parti, la conçoit pour pouvoir en profiter lui-même.<o:p></o:p>

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    Un tel système, dont les effets pervers sont amplifiés par le quinquennat où la primaire interne est permanente, a fait ses preuves : tout candidat socialiste investi par le parti est condamné d’avance. Le seul qui n’ait jamais échappé à cette malédiction, François Mitterrand, était, de fait, candidat investi avant même l’existence du Parti socialiste auquel il a simplement demandé de ratifier sa candidature naturelle. Pour le reste, sept échecs. La machine à désigner du Parti socialiste est une machine à perdre : elle paralyse le parti, lui interdit de travailler collectivement et transforme le candidat investi en éclopé.<o:p></o:p>

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    Ce système aberrant conserve pourtant encore quelques défenseurs pris de vertige à l’idée qu’un parti dépossédé de la désignation du candidat ne servirait à rien ! À ceux-là il faut redire l’évidence : c’est la compétition permanente entre présidentiables qui vide le parti de son utilité et de son autorité. <o:p></o:p>

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    Comment en sortir ? En désignant un premier secrétaire qui soit aussi le candidat à la présidentielle disent quelques-uns. Mais outre que ce leader naturel n’existe pas à ce jour, il est à craindre que rebâtir la vie entière du parti autour d’un chef assècherait plus encore le PS qu’il ne l’est aujourd’hui. Les débats, la discipline, tout serait second à la volonté de notre candidat. Ce serait la Ve République, tant critiquée à gauche, dans le parti lui-même. Plus d’ordre sûrement. Mais un surcroît d’ordre n’a jamais créé un supplément d’âme.<o:p></o:p>

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    Par contraste, l’organisation d’un système de primaires françaises représente bien des avantages. La force des débats qui s’y engagerait devant la société serait un point d’appui essentiel pour donner un souffle nouveau à la campagne électorale. Libéré des combats sclérosants de l’investiture, le PS pourrait se consacrer pleinement à ce qui devrait être ses missions essentielles : travailler collectivement à l’élaboration de la plateforme politique ; renforcer son implantation dans le pays et élargir sa base militante ; développer ses capacités d’organisation pour devenir la base logistique performante et moderne de la future campagne présidentielle.<o:p></o:p>

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    Cinq millions d’électeurs de gauche (soit près du quart des votants PS), 5 euros de contribution pour voter : tel devrait être les objectifs de ces primaires populaires ouvertes à toute la gauche, écologistes compris. Le futur premier secrétaire du PS, devra être l’arbitre et veiller à la réussite de ces premières primaires qui pourraient se dérouler début 2011. Il ne devra donc pas être candidat lui-même. Trois années de travail pour adapter à notre vie politique le principe des élections primaires devraient suffire.<o:p></o:p>

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    Que se serait-il passé s’il n’y avait pas eu de primaires aux Etats-Unis ?<o:p></o:p>

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    Les militants démocrates auraient désigné à une très large majorité Hillary Clinton, très implantée dans l’appareil démocrate. Barack Obama ?  On n’en aurait jamais entendu parlé. Le système des primaires qui a permis à un tel candidat d’émerger et d’être investi est un système qui mérite qu’on s’y intéresse de près. 

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    Thierry MANDON – Membre du Conseil National du PS<o:p></o:p>

                     Maire de Ris-Orangis<o:p></o:p>

    Article,paru dans le journal Libération du mardi 9 septembre 2008.<O:P></O:P>


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