• Les ateliers de la rénovation, Paris, 1er juin 2008

     

    Les ateliers de la rénovation, Paris, 1er juin 2008

     

     Compte-rendu (version en pdf en pièce jointe, également disponible sur le site www.reconstruirelagauche.fr)

     

    Atelier n°1

     

    « Retour sur la déclaration de principes du Parti socialiste »

     

    Dans son introduction, Laurent Baumel, maire de Ballan-Miré et responsable national du PS aux Études, a souligné que répondre aux nouveaux enjeux de la France nécessitait, pour les socialistes, de mener une réflexion de fond sur leur identité. Il a salué le travail réalisé en ce sens par les Reconstructeurs.

     

    Pour Thierry Mandon, maire de Ris-Orangis, la nouvelle déclaration de principes du Parti socialiste comporte différents aspects marquants. Dans un contexte marqué par l'échec des socialistes à l'élection présidentielle et donc par la nécessité absolue de s'adapter, le texte comporte des aspects positifs. C'est le cas de la prise en compte du poids de l'écologie et de la grande actualité des valeurs socialistes. Thierry Mandon a tenu à se faire le porte-parole des propositions du Pôle Écologique du PS en appelant à voter ses amendements dans les fédérations au cours des conventions fédérales. Enfin, il a insisté sur le caractère primordial de la démarche de texte unitaire, porteuse de modernisation, de rénovation, sans repentance et sans recul.

     

    Atelier n°2

     

    “Nous voulons prendre au sérieux la rénovation de la gauche et du PS”

     

    Le PS ne pourra mobiliser l'ensemble de la société qu'en retrouvant l'esprit collectif qui a longtemps fait sa force. Pour les intervenants de cette table-ronde, l'urgence est au jeu collectif et pas au choc des individus.

     

    Sandrine Mazetier, députée de Paris, précise d'entrée que la reconstruction n'est pas qu'une affaire de congrès : à l'avenir, les socialistes devront davantage se respecter, s'écouter à nouveau les uns les autres sans se focaliser sur des divergences du passé. Il faut miser sur la diversité des socialistes, condition de leur unité. C'est ainsi qu'ils pourront « accoucher » d'un nouveau parti.

     

    Guillaume Bachelay, conseiller général de Seine-Maritime et maire-adjoint de Cléon, met en avant la nécessité de retrouver un esprit de camaraderie au sein du parti. Pour lui, il est temps de reconstruire le parti de « l'émancipation de l'individu et de la transformation sociale ». « Là où il y a des destructeurs, des liquidateurs, il faut pacifiquement des reconstructeurs ». Par nature, le PS est loin de l'esprit du libéralisme. Notre objectif de faire du PS le grand parti de la gauche pouvant recueillir 35% des le premier tour.

     

    Dans la salle, de nombreux intervenants ont regretté l'absence de réaction du Parti socialiste sur les sujets qui font l'actualité et qui intéressent la vie des Français. C'est le cas pour le récent jugement du Tribunal de Grande Instance de Lille qui fait de la virginité d'une femme avant le mariage une qualité essentielle : ce jugement a été qualifié « d'atteinte à la dignité de la personne humaine, à l'intégrité de la femme et aux valeurs de la République ».

     

    Pour reconstruire, il est primordial de se remettre au travail, d'organiser à nouveau des conventions nationales sur les thèmes majeurs. Ces conventions avaient joué un rôle non négligeable lors de la dernière victoire des socialistes, en 1997. Les sujets choisis doivent être ceux qui sont au coeur de la société, par exemple la souveraineté politique dans la mondialisation ou encore les stratégies de croissance pour lutter contre les délocalisations.

     

    Le PS doit se doter de nouveaux outils de communication : une chaîne de télévision pourrait ainsi être créée sur Internet. Il doit mener une véritable campagne d'adhésion.

     

    Enfin, le message du PS doit être celui la fierté de son identité socialiste. Les épithètes sans cesse ajoutés à « socialisme », tels « moderne » ou « archaïque », sont superflus : il n'y a qu'un socialisme. Il faut porter haut et fort les couleurs de cette identité, par nature productive, redistributrice et protectrice.

     

    Suivant le mot de Guillaume Bachelay, le PS doit définitivement sortir du triangle des Bermudes « sondages, images, naufrages ».

     

    Henri Weber, député européen, a souligné que c'était une même conception de l'action politique et une même ambition pour le Parti socialiste qui regroupaient les Reconstructeurs. Ces derniers refusent soumission aux règles de la démocratie médiatico-sondagière et de la présidentialisation à outrance. Les Reconstructeurs veulent construire le parti de toute la gauche. Ils veulent aussi être les champions du retour de la puissance publique et de la négociation collective dans la vie économique et dans la société afin de maîtriser et de rendre équitable la mondialisation. La relance et la  réorientation de l'Union européenne est un de leurs objectifs majeurs afin de lui donner un second souffle. Les Reconstructeurs veulent nouer un nouveau Pacte social entre les salariés et les entrepreneurs, sous l'égide de l'Etat : ils veulent agir pour la modernisation de l'économie et de la société face aux changements du monde.

     

    Après être revenu sur l'utilisation et le sens du qualificatif de « pétaudière » qu'il avait appliqué au PS quelques jours plus tôt, Jean-Christophe Cambadélis, député de Paris, a souligné que la réunion des Reconstructeurs n'était « ni inclusive, ni exclusive, ni conclusive, mais qu'elle était déjà décisive » au sens où elle permettait, par le libre débat, de réunir non pas « une seule tête mais plusieurs têtes qui pensent ensemble ». Tournés vers l'avenir, les socialistes doivent travailler à la construction d'une « alternative politique qui soit à la fois réaliste et imaginative ». Avant de désigner leur candidat à l'élection présidentielle, ils doivent se mettre ensemble au travail.« Il faut que le PS se mette au travail ». A la suite d'Henri Weber, il a estimé que la question essentielle est celle du dépassement du PS, seul moyen de renouer avec la victoire. Il s'est enfin félicité qu'avec les Reconstructeurs, « un vent nouveau souffle sur le Parti socialiste ».

     

    Arnaud Montebourg, député de Saône-et-Loire et président du Conseil général, a préconisé une défense sans concessions des grandes oeuvres de la gauche (RMI, 35 heures...), véritable patrimoine commun . Assumer le passé est nécessaire pour savoir ce que les socialistes feront de leur avenir. D'où l'initiative des Reconstructeurs qui sont conçus comme « une force d'interposition pour nous débarrasser de la guerre des chefs ».

     

    Atelier n°3

     

    “Nous voulons un autre modèle de croissance crédible et réaliste dans la mondialisation”

     

    Philippe Martin, député du Gers et président du Conseil général, appelle à une nouvelle déclaration des Droits de l'homme qui soit à la fois solidaire et écologiste.

     

    Jean-Paul Huchon, président du Conseil régional d'Île-de-France, souhaite un Parti socialiste d'opposition intelligente et de soutien aux efforts des collectivités territoriales.

     

    « Nous acceptons la mondialisation mais nous nous devons de la rendre acceptable » a poursuivi Jean-Paul Huchon. Il faut une relance de la démocratie sociale au sein des entreprises, travailler à sécurisation des parcours professionnels, organiser de nouveau la croissance planétaire, trop d'abus ayant eu lieu dans ce domaine. Le rôle de la recherche et de l'innovation, véritable moteur de l'économie et accélérateur de la croissance à venir, doit être encore revalorisé.

     

    Selon Marie-Noëlle Lienemann, députée européenne, un régime équitable permettant la négociation de « bloc à bloc » doit se substituer au libre-échangisme.

     

    Eric Loiselet, Premier secrétaire fédéral du PS de la Haute-Marne, a rappelé que la financiarisation de la société était néfaste à l'économie et devait être impérativement régulée. Les socialistes acceptent l’économie de marché à la condition expresse de la distinguer du capitalisme. Le capitalisme trouve son aboutissement dans la financiarisation dérégulée alors que l'économie de marché trouve son aboutissement dans l'économie de production, au sein de laquelle s'émancipe le travail. Évoquer le coût du travail lorsque l'on parle de productivité n'a pas de sens.

     

    Pour Claude Bartolone, député de la Seine-Saint-Denis et président du Conseil général, le Parti socialiste doit s'atteler à bâtir un projet alternatif solide car le monde a changé. S’il a perdu en 2002 et 2007, c'est d’abord parce qu'il n'a pas su proposer un tel projet aux Français.

     

    La lutte doit s'organiser immédiatement au sein du PS contre les tentatives de démantèlement du Code du travail. Les socialistes doivent aussi renouer avec leur idéal d'une Europe politique et sociale. Nous quittons une décennie de débat sur les institutions pour entrer dans un temps long de débat sur les politiques communes sur lesquelles nous devons réfléchier et agir en commun. Nous partageons les mêmes objectifs d’une Europe sociale et d’une Europe forte.

     

    « Fier de faire travailler ensemble carpes et lapins », Claude Bartolone résume l'enjeu central en lançant « Qu'est ce que l'on a à dire aux salariés? », « ceux qui payent aujourd'hui » par leur précarité et la baisse drastique de leur pouvoir d'achat suite à la défaite de la gauche.

     

    Pierre Moscovici, député du Doubs, a estimé que la question fondamentale à laquelle les socialistes doivent répondre est « qu'est-ce qu'être socialiste au 21ème siècle». Le PS doit clarifier ses options et non se contenter de trouver un candidat. Être socialiste, c'est avant tout lutter contre les inégalités, ce qui impose de se garder de tout débat superficiel. Le socialisme a évidemment à voir avec la question des libertés. Il prône l'égalité entre les femmes et les hommes, défend les droits des homosexuels, mène depuis toujours des combats visant à accroître les libertés individuelles. Le Parti socialiste ne doit pas prôner le libéralisme mais l'égalité réelle.

     

    Atelier n°4

     

    “Nous voulons fonder un nouveau pacte républicain sur nos valeurs”

     

    La solidarité est au coeur du Pacte Républicain. Les socialistes prônent l’émancipation des individus et refusent l'avènement de l’individu égoïste et solitaire. Pour promouvoir l'individu solidaire, il faut redonner toute sa valeur à l'engagement associatif, au bénévolat, en passant peut-être par l'instauration d'un service civique.

     

    Pour Mao Peninou, Conseiller de Paris et du 19e arrondissement de Paris, il s'agit non pas tant de fonder un nouveau Pacte Républicain que de rétablir le Pacte Républicain existant. Du fait de la ségrégation entre villes et banlieues, quartiers riches et pauvres, il existe aujourd'hui une partie de la population pour laquelle le Pacte Républicain ne s'applique pas. L'état de droit doit être rétabli sur l'ensemble du territoire. Les mêmes droits, les mêmes possibilités de s'en sortir où que l'on soit sur le territoire de la République, doivent être garantis.

     

    Flora Labourier, Secrétaire nationale du Mouvement des Jeunes Socialistes, rappelle  qu'un pacte est d'abord un accord entre individus. Cet accord étant implicite dans le cas du Pacte Républicain, son maintien nécessite la croyance dans la capacité du système à générer du progrès social. Au coeur du Pacte républicain se place donc la question sociale. La faillite de ce pacte fondateur est aussi celle du PS. D'une part, l'adjectif « social » est presque devenu au fil du temps pour le PS un tabou ; d'autre part, les socialistes n'ont pas su continuer à faire fonctionner l'ascenseur social.

     

    Le député de Seine-Maritime Laurent Fabius a estimé de son côté que la démarche des Reconstructeurs était « ce qu'il y a de plus nouveau, de plus utile aux Français qui a été fait au Parti socialiste depuis des années ».

     

    Les Reconstructeurs « sont des militants, des responsables, qui n'ont pas toujours travaillé ensemble mais là, qui ont décidé de travailler ensemble pour bâtir un projet de gauche ».

     

    C'est en ce sens que les ateliers de la rénovation seront utiles pour répondre à la crise du Pacte Républicain : la population ne croit plus dans la capacité de la politique à traduire les valeurs socialistes dans la réalité. L'ancrage à gauche est indispensable au moment où « les trois couleurs de la République reculent devant la seule couleur de l'argent ».

     

    Cette clarification est nécessaire au-delà des frontières de l'hexagone. En Europe, une spirale négative s'est installée pour la gauche. Les socialistes et les sociaux-démocrates sont le plus souvent en grande difficulté, à l'exception peut-être de l'Espagne, au moment même où les nuages s’accumulent sur l’économie mondialisée : subprimes, dégradation de l’environnement, dérégulation, baisse du pouvoir d'achat et crise alimentaire. Paradoxalement, alors que ces crises conduisent  à un plébiscite des valeurs de la gauche, c'est la droite qui sort gagnante.

     

    Laurent Fabius résume les dysfonctionnements internes au PS à ce propos tenu devant lui par un secrétaire de section quelques semaines plus tôt : « Au PS il y a une chose que j'apprécie et une que j'aime moins. Ce que j'aime c'est que l'on me demande souvent mon avis. Ce que j'apprécie moins c'est qu'on en tient jamais compte. » Pour renouer avec les victoires, Laurent Fabius appelle au retour à un débat sincère et fraternel pour construire un projet gagnant de gauche.

     

    Face à la véritable révolution conservatrice lancée par la droite, Christian Paul, député de la Nièvre, qualifie le rassemblement des Reconstructeurs de moment d'autant plus « précieux » qu'il n'a pas eu d'équivalent depuis 2002.

     

    Le Pacte républicain lui paraît être autant un bouclier qu'une promesse. L'exemple de l'éducation, point central du pacte, est le symbole de la volonté d'une droite nationale-libérale de s'attaquer au fondement même du pacte. Il constate que le PS n'a pas été le premier opposant aux réformes touchant à l'Education nationale. Il a été supplanté par les lycéens et même par les collégiens qui ont reçu la Palme d'or à Cannes, pour un film à l'opposé de la politique de Nicolas Sarkozy.

     

    Refonder le Pacte Républicain passe pour Christian Paul par la réinvention de l'action publique, afin de redonner toute sa place à la puissance publique.

     

    Invitée à conclure ce dernier atelier de la journée, Martine Aubry, maire de Lille et présidente de la Communauté urbaine, s'est exclamée d'entrée : « Comment cela, nous n'avons rien à faire ensemble ? Mais nous sommes socialistes ! ». « Il n'y a pas besoin" » d'accoler un qualificatif au mot « socialiste », a-t-elle ajouté, estimant que « ceux qui ont honte de le dire n'ont rien à faire dans notre parti ».

     

    Le laisser-faire de la droite, qui consiste à permettre au marché de s'insinuer dans l'ensemble des sphères de l'économie, a fragilisé le Pacte républicain.

     

    La désagrégation du lien social conduit désormais à envier son voisin parce qu'il a un travail, à envier son collègue parce qu'il est en CDI. Les citoyens se résignent au discours dominant qui explique que la seule solution réside dans la concurrence entre tous.

     

    Face à cette offensive de la droite, le Parti socialiste doit marteler « qu'il n'y a pas de liberté sans égalité ». Être moderne n'est pas prôner une dérégulation générale, par ailleurs de plus en plus rejetée. Même l'ancien directeur du Fonds Monétaire International Rodrigo Rato demandait plus de régulation.

     

    La politique ne peut se résumer à consulter la population sur ses souhaits. Elle consiste avant tout à mettre en avant des valeurs. Les socialistes doivent porter les leurs avec fierté : « il faut remettre la phrase dans le bon ordre et dire qu'il n'y a pas d'ordre sans justice ». Les socialistes ne doivent pas avoir avoir honte des congés payés, de l'abolition de la peine de mort, de la CMU ou des 35 heures. Il faut d'ailleurs rappeler à la Droite que « la France n'a jamais été aussi forte que lorsqu'elle portait haut ses valeurs et son Pacte Républicain ».

     

    « Si nous continuons comme cela, nous gagnerons le congrès en novembre » a conclu Martine Aubry, très applaudie, appelant les Reconstructeurs à renouer avec « une gauche collective, solidaire et joyeuse ».

     


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